En 2007, le Lean Enterprise Institute, fondé par Jim Womack, avait réalisé une étude auprès de 2 500 personnes afin de savoir quels étaient les obstacles au déploiement du lean (lean survey 2007). Les participants à la journée thématique Lean et Services 2010 ont accepté de répondre à la même question. Nous étions moins nombreux, c’est certain, mais le résultat a de l’intérêt :
Nous avions souhaité compléter l’information en posant une deuxième question aux participants : « pourquoi faites-vous du lean ? »
Comment interpréter ces chiffres ?
L’engagement visible d’un dirigeant, ou son absence, impacte directement le déploiement du lean selon l’opinion des français qui s’intéressent au lean dans les services.
On comprend bien la nécessité d’obtenir un vrai soutien managérial car le choc culturel du lean déstabilise en interne : de façon positive les collaborateurs, lorsque la démarche intègre le volet « respect for people »* indispensable aux puristes, et de façon plus perturbante le management qui se sent remis en cause. D’ailleurs, l’opposition du middle management représente un risque important lors du déploiement (cf chiffres du sondage). Un soutien affiché et constant d’un ou plusieurs dirigeants permettra d’aplanir certaines difficultés.
Au delà de cette contribution attendue par les équipes qui déploient le lean, l’engagement des dirigeants est aussi primordial pour donner un sens au déploiement : quels sont vraiment les critères de succès ? Il ne s’agit pas ici d’obtenir une certification (elle n’existe pas dans le domaine du lean) ou de conduire x projets. Il s’agit en fait de trouver les leviers qui permettront à l’entreprise d’être plus … compétitive et de demander aux équipes lean d’y contribuer. Lorsque le lien entre compétitivité et lean est clairement établi, on imagine que les dirigeants seront plus investis dans le déploiement – même si, dans la réalité, toutes les attitudes sont possibles.
Il importe alors que les résultats économiques soient visibles, faute de quoi la diffusion du lean sera plus difficile. L’Institut Lean France préconise une grande attention à ce point, trop souvent considéré comme allant de soi : dès la sélection des sujets ou périmètre, il faut savoir quel sera le bénéfice économique. Parce que réussir, c’est pérenniser l’entreprise et ses emplois, peut être aussi ceux de ses clients et de ses fournisseurs. Il s’agit d’une responsabilité à prendre avec beaucoup de sérieux.
A contrario, il émerge peu de points forts du songage sur les motivations à faire du lean. On y retrouve d’abord la recherche d’une efficacité opérationnelle basée sur les délais, la qualité et les coûts.
En deuxième niveau apparaissent :
- la performance de l’entreprise avec les thèmes « améliorer la compétitivité » et « dégager du cash ».
- différents aspects managériaux tels que « changer notre culture », « gagner en agilité » puis « remotiver les équipes ». En espérant qu’ils s’inscrivent bien dans le principe, à nouveau, du « respect for people ».
La rupture la plus forte entre les enquêtes de 2007 et de 2010 concerne la disparition du frein « difficulté à accéder à l’expérience ». Interprétons-le comme un signe très encourageant : le lean se diffuse.
Marie-Pia Ignace
mp.ignace@operae.fr
** Plus de précisions sur le site The Lean Edge.